Harcèlement Moral et la preuve par l’enregistrement téléphonique.

Contrairement à ce qui est cru généralement, l’enregistrement téléphonique par le salarié à l’insu de l’employeur peut être recevable à la condition qu’il soit indispensable pour prouver le harcèlement et que l’atteinte portée à la vie privée de l’employeur soit proportionnée au but recherché. C’est l’arrêt qu’a rendu la Cour de Cass le 10 juillet 2024 (Cass du 10/7/24 n°23-14.900).

Une salariée a contesté son licenciement devant le Conseil des Prud’hommes en invoquant un harcèlement moral qui durait depuis plusieurs mois. Elle a produit au tribunal un enregistrement téléphonique réalisé à l’insu de son employeur et dont le contenu révèle que ce dernier a exercé des pressions pour lui faire signer une rupture conventionnelle sous menace de licenciement. Les juges du fond ont au départ rejeté l’apport de cet enregistrement estimant qu’il était contraire aux principes de loyauté de la preuve. L’affaire a été portée devant la Cour de cassation par la salariée.

La décision rendue par la Cour de Cassation :

La Haute cour a retenu la possibilité pour un salarié de produire un enregistrement réalisé à l’insu de l’employeur lors des débats, à condition que les juges l’estiment indispensable pour attester le harcèlement allégué par la salariée.

Pour la Cour de Cassation, l’enregistement est bien admis comme moyen de preuve à la condition que l’atteinte à la vie privée de l’employeur reste proportionnée au but poursuivi.

La Cour rappelle dans cet arrêt que la charge de la preuve n’incombe pas au salarié mais que celui-ci doit apporter des éléments qui le laissent présumer. C’est ensuite à l’employeur de démontrer le contraire. La décision des juges de première instance a donc été annulée par la Cour de Cassation. Elle a renvoyé l’affaire en jugement et les juges de renvoi devront maintenant établir si la salariée était en mesure ou pas de présenter d’autres éléments laissant présumer le harcèlement allégué. Si ce n’est pas le cas, ils devront ensuite évaluer si l’apport au dossier de l’enregistrement porte une atteinte proportionnée à la vie privée de l’employeur.

Cette décision est un retournement majeur sur le terrain du traitement judiciaire en matière de harcèlement moral et des moyens retenus pour le combattre.

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